En dépit des incidents constatés çà et là à travers le pays, les Congolais ont voté hier dans un climat relativement apaisé.
Malgré une pluie diluvienne qui s’est abattue sur Kinshasa dans la matinée d’hier dimanche 30 décembre, les Kinois se sont massivement mobilisés pour accomplir leur devoir civique jusque tard dans la nuit. Corneille Nangaa peut donc se frotter les mains. Le numéro un de la Centrale électorale a gagné le pari de l’organisation des élections apaisées, démocratiques et transparentes, avec la machine à voter. Le calme a régné sur l’ensemble du pays et le vote s’est déroulé dans une ambiance bon enfant. Ce, en dépit de quelques imperfections d’ordre organisationnel constatées ça et là.
A en croire le président de la Ceni, 77.3% de bureaux ont ouvert à temps, les machines à voter ont bien fonctionné. Dans son intervention à la télévision nationale, Corneille Nangaa a loué la présence et le professionnalisme des agents de l’ordre, qui ont escorté le matériel et sécurisé les sites électoraux, la " forte présence des témoins et observateurs "…
Pour lui, il n’y a pas l’existence des bureaux fictifs mais plutôt des " sites complémentaires ", aménagés là où les bureaux n’ont pas fonctionné ou ont été insuffisants. Le numéro un de la Ceni a reconnu la survenance des problèmes d’ordre technique, notamment la polarité des batteries internes des machines à voter, l’absence de certains accessoires (câbles, fiches…), pannes d’imprimantes suite à "l’humidité de certains bulletins de vote."
MORT D’HOMMES DEPLOREE A WALUNGU DANS LE SUD-KIVU
Il a cité particulièrement les cas d’Ilebo, qui a reçu des bulletins de vote d’ailleurs et de la commune de Limete (Kinshasa) qui s’est retrouvée sans listes électorales. Mais, dans chaque cas, selon le président de la CENI, un dispositif était actionné pour y remédier.
Sur le plan sécuritaire, Corneille Nangaaa déploré le drame de Walungu (Sud-Kivu) : la mort d’un policier et d’un agent électoral, lynché par la population "instrumentalisée" par certains politiciens.
C’est tout à fait normal. Car pour une première expérimentation de la machine à voter, on ne pouvait pas s’attendre à la perfection. Un autre élément qui a perturbé le bon déroulement du vote dans certains bureaux de Kinshasa a été l’omission de certains noms sur les listes électorales. Mais, jusque-là, on ne sait pas bien si ces électeurs se retrouvent parmi les radiés ou ont été réellement omises par la Ceni. Mais dans certains bureaux de la commune de Limete, les listes électorales sont arrivées tardivement. Ce qui a poussé les électeurs à voter jusque tard dans la nuit.
Pour le moment, le taux de participation à ce scrutin n’est pas encore connu. Il n’est pas non plus prudent de se lancer dans la spéculation des chiffres car, les résultats provisoires, du moins pour la présidentielle, seront connus le 6 janvier 2019, suivant le calendrier réaménagé de la Ceni.
Dans les communes de Barumbu, Kinshasa et Lingwala, la plupart des bureaux de vote sont érigés dans des écoles primaires et secondaires. Ces endroits ont été inondés par l’eau de pluie. Mais les électeurs assoiffés de toucher à la fameuse machine à voter, ont bravé ces eaux pour atteindre les bureaux de vote.
Déjà entre 6 heures et 7 heures, les différents centres de vote des communes précitées étaient déjà ouverts. A l’entrée, il y avait toujours quelqu’un pour faciliter aux électeurs le repérage de leurs noms sur les listes électorales. A notre arrivée à l’école primaire Luanga, dans la commune de Barumbu, nous avons suivi les directives pour retrouver notre nom sur la liste, avant de voter.
Mais cet exercice n’a pas du tout été aisé pour tous les électeurs, surtout que ce centre n’était pas initialement prévu dans la cartographie des bureaux de vote. Les votants déversés dans ce centre s’étaient enrôlés dans une autre école, le complexe scolaire Stella et le jour du vote, ils se rendent compte que leur centre n’a pas fonctionné. Ce qui a découragé certains. D’autres par contre sont allés jusque-là où ils pouvaient voter. Conséquence, tous les bureaux de centre n’ont même pas atteint la moitié des électeurs attendus par bureau de vote (autour de 270 à 290 votants sur les 699 attendus).Le dépouillement a commencé aux environs de 20 heures dans la plupart des centres de vote.
LA MACHINE A VOTER MET TOUT LE MONDE D’ACCORD
D’après les informations en notre possession, il n’y a pas eu des réclamations quant à l’utilisation de la machine à voter. Les électeurs ont unanimement salué l’avènement de cet outil très pratique. " Vraiment je regrette beaucoup le comportement de nos politiciens. Ils nous ont trompé en disant que c’était la machine à tricher or un outil très pratique. Moi, c’est pour la première fois que j’utilise cette imprimante, mais c’est génial. Imaginez-vous, je n’ai même pas fait une minute parce que j’avais sur moi tous les numéros de mes candidats", raconte M. Jean Robert, une sexagénaire rencontré au sortir d’un bureau de vote à Barumbu.
" Moi je me suis fait aider par un témoin vu mon âge et mon état de santé. Il m’a seulement montré comment je devais taper le numéro de mon candidat à chaque étape et c’est allé rapidement. C’est vraiment bien. On nous a menti que c’était la machine à tricher", regrette une vieille dame, visiblement malade.
Le rapport partiel des observateurs catholiques frise le doute
La mission d’observation électorale citoyenne de Justice et Paix Congo, de la Conférence des évêques congolais a rendu son rapport préliminaire dans la mi-journée sur un échantillon représentatif des centres de vote sur toute l’étendue du pays. Ce rapport relève certains dysfonctionnements dans le déroulement des scrutins.
Il fustige l’installation d’environ un sixième des bureaux de vote et de dépouillement dans des lieux prohibés par la loi ; 830 bureaux de vote (soit environ un sixième) n’ont pas ouvert à 6h, comme prévu, pour diverses raisons : aménagement tardif du bureau, procédures d’ouverture trop longues, dysfonctionnement de la machine à voter… ainsi que l’interdiction d’accès ou l’expulsion de témoins des partis politiques, notamment à Kinshasa, au Nord-Ubangi, à l’Equateur et au Kwilu, etc.
Cette semaine sera très déterminante pour la suite du processus électoral. Et l’avenir du pays en dépend. Toutes les parties prenantes au processus électoral doivent contribuer à l’apaisement des esprits en s’abstenant de balancer des tendances de vote en faveur de tel ou tel autre candidat. Les médias aussi doivent s’impatienter à attendre la publication de la Ceni qui tombe, sauf imprévu, à la fin de la semaine, en évitant de relayer des fakenews.
MOLINA / Forum des As