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La bataille s’annonce rude pour la présidence du bureau définitif de la Chambre haute du Parlement. Modeste Bahati, autorité morale de l’AFDC-A, va bel et bien affronter Alexis Thambwe Mwamba qui a obtenu le plébiscite du Front commun pour le Congo. Dans cette bataille, l’autorité morale de l’AFDC-A part avec un handicap en ce qu’il est, de tous les temps, le mal aimé, du PPRD/FCC.

Les antivaleurs ont la peau dure dans la classe politique congolaise et, plus particulièrement, dans le camp du régime sortant, incarné aujourd’hui par le Front commun pour le Congo (FCC). Cette méga plateforme politique, majoritaire dans les deux Chambres du Parlement et même dans les assemblées provinciales, n’en a cure du changement insufflé par l’alternance démocratique intervenue le 24 janvier dernier à l’issue des élections du 30 décembre 2018. La moralisation de la classe politique, tant souhaitée, n’a jamais enchanté cette plateforme politique dont Joseph Kabila est l’autorité morale.
Conduit par le PPRD, le FCC n’entend pas se départir de ses méthodes révolues consistant à tripatouiller les textes légaux, ou à fausser le jeu politique par des pratiques de débauchage sous-tendues par la corruption sous toutes ses formes. Qu’il s’agisse de ses adversaires politiques de l’opposition ou au sein même de son propre camp, le FCC brille par la sauvegarde de ses intérêts égoïstes. 
Hier, c’était le candidat indépendant à la présidence de l’Assemblée nationale, l’honorable Henri- Thomas Lokondo, qui a fait les frais d’une injustice manifeste commanditée par les sbires du FCC. Il s’est vu désavoué par sa famille politique, Palu et Alliés, avant d’être invalidé, en violation du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Cela au motif qu’il avait osé défier la candidate désignée du FCC, Jeanine Mabunda. D’aucuns sont tentés d’insinuer que le député national Thomas Lokondo a été victime d’une sorte de gangstérisme politique du bureau provisoire répondant aux injonctions du FCC.
Aujourd’hui, c’est une figure très connue de la scène politique congolaise qui en fait les frais.

Bahati paie pour sa franchise
Modeste Bahati Lukwebo, autorité morale de l’AFDC-Alliés, est en train de subir les effets des mêmes pratiques venant du FCC. Son péché ? C’est d’avoir osé exprimer ses ambitions en posant sa candidature au poste de président du bureau définitif du Sénat. Même en y allant comme candidat indépendant, il a été taxé de défroqué. Il est allé à l’encontre du choix de la plateforme et, par ricochet, de l’autorité morale du FCC.
Sans surprise, le PPRD/FCC a recouru à la même stratégie, à savoir la fragilisation assortie de diabolisation. Quid ? Pour le disqualifier dans l’opinion, le candidat Modeste Bahati a été vilipendé par un groupe de parlementaires de l’AFDC et Alliés (10 députés et 1 sénateur). 
Dans une déclaration faite le samedi 6 juillet, ces frondeurs soutiennent que « Du moment que le FCC, après sélection de différentes candidatures, a retenu celle du camarade Alexis Thambwe Mwamba, étant disciplinés, nous n’avons pas d’autres choix que de se plier à la décision de la haute hiérarchie de notre famille politique, à savoir le FCC. C’est pourquoi nous soutenons la candidature du camarade Alexis Thambwe Mwamba et nous appelons les honorables sénateurs de l’AFDC et Alliés à voter massivement pour lui, puis nous réitérons notre indéfectible loyauté à notre autorité morale du FCC, Joseph Kabila Kabange ». Cela sautait aux yeux, Néné Nkulu, la présidente du groupe parlementaire AFDC et Alliés, a été instrumentalisée. 
En réaction, l’autorité morale de l’AFDC et Alliés a minimisé cette rébellion au sein de sa famille politique. Il se veut serein. « L’AFDC-A compte 44 députés nationaux, 70 députés provinciaux et 13 sénateurs. Au total 127 parlementaires. De toute évidence 11 d’entre eux (10 députés nationaux et 1 sénateur) n’ont pas pu résister aux pressions et à une éventuelle corruption. C’est cela aussi la politique congolaise », a déclaré Modeste Bahati dans un message envoyé à Actualite.cd.
On est donc parti pour un bras de fer entre AFDC-A et le FCC. Modeste Bahati tient à en découdre avec Alexis Thambwe devant les sénateurs. Bref, il oublie les apostats et maintient sa candidature jusqu’au vote attendu sans doute pendant la session extraordinaire en vue. « En attendant qu’ils reviennent à la raison, nous avançons avec les 116 élus qui comprennent le sens de notre combat jusqu’à la conquête du perchoir du Sénat. Je maintiens donc ma candidature tel que décidé à l’unanimité de notre regroupement AFDC-A », a dit Bahati.
Comme on le voit, c’est par le même mode opératoire que le FCC procède. D’abord, on corrompt quelques membres pour qu’ils fassent une déclaration contre leur autorité morale et ensuite, on passe à la phase décisive qui consiste à invalider le candidat « indiscipliné ». 
A y regarder de plus près, Modeste Bahati passe pour le mal aimé. Deuxième force politique au sein du FCC après le PPRD, l’AFDC-A devrait logiquement prétendre à des postes de choix dans les institutions de la République. Dès lors que le PPRD s’est déjà adjugé le poste de la primature dans le gouvernement et la présidence de l’Assemblée nationale, n’était-il pas loisible que l’AFDC-A prétende aussi à occuper la présidence du Sénat qui reste le plus grand poste dans ce partage des postes ?
Pourquoi le PPRD doit-il tout rafler, mettant à nu sa boulimie politique ? Primature, présidence de l’Assemblée nationale et des assemblées provinciales, cela ne pouvait-il pas suffire pour aller récupérer un poste qui devrait revenir de droit un partenaire de taille ? Des observateurs avisés sont d’avis que Bahati Lukwebo paie pour sa franchise face à Joseph Kabila. Il dit tout haut ce que les autres disent tout bas. 
A tout prendre, le FCC est pris en otage par le PPRD et son autorité morale. Ainsi, tous les partis politiques, personnalités et autres plateformes membres du FCC sont tenus de redire sans faille leur loyauté à l’autorité morale, même sans contrepartie. Les personnalités qui osent défier le leadership du FCC se voient toujours désavouées, en tout cas leur projet indubitablement court-circuité. Reste à voir si le FCC réussira cette fois-ci à arrêter les ambitions de l’autorité morale de l’AFDC-A.

Avec le Potentiel