Imprimer

Les forces de sécurité zimbabwéennes auraient procédé à de nouvelles interpellations ces derniers jours. Jeudi, la police a notamment effectué une descente au domicile du président d’une coalition d’ONG, confisquant les passeports de sa famille. Selon le ministère de la Sécurité, plus de 600 personnes ont été arrêtées depuis une semaine. La société civile s'insurge du silence face à cette répression.

La société civile zimbabwéenne dénonce le silence assourdissant de ses voisins. Pas un mot de l’Union africaine ni de l’organisation régionale, la SADC (Communauté de développement d'Afrique australe).

Seul le président sud-africain a évoqué la situation. Présent au Forum économique mondial de Davos, Cyril Ramaphosa a appelé la communauté internationale à lever les sanctions contre Harare.

Pour Dewa Mavhinga de Human Rights Watch, le président sud-africain est passé à côté du problème. « Il n’a pas condamné les violences ni fait pression pour que les autorités zimbabwéennes mettent un terme à ces abus, pointe-t-il. S’il doit y avoir discussions sur une éventuelle aide financière pour le Zimbabwe, il va falloir évoquer la crise politique. L’Afrique du Sud doit faire preuve de leadership et insister pour que Harare respecte le droit de ses citoyens. »

Pour Nkosana Moyo, économiste et ancien ministre zimbabwéen de l’Industrie, ce ne sont pas les sanctions qui étouffent son pays, mais la corruption, l’incompétence et la violence. « Nous autres, les Zimbabwéens, avons détruit notre pays, pas la communauté internationale, rappelle-t-il. C’est une rhétorique du parti au pouvoir, mais c’est faux. La police a abattu des manifestants juste après les élections, puis a recommencé la semaine dernière et a coupé l’Internet. Comment voulez-vous après cela convaincre les investisseurs de revenir dans le pays ? Cela n’est pas possible. »

Le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa a dû annuler son voyage à Davos cette semaine pour gérer la contestation dans son pays.

La répression incompatible avec un dialogue

Mardi, il avait appelé à un dialogue national. Mais pour Dewa Mavhinga de Human Rights Watch, qui s’exprimait lors d’une conférence de presse de la société civile à Harare, un dialogue n’est pas possible dans ce contexte.

« C’est dans ce contexte de répression que le président Mnangagwa affirme vouloir ouvrir la porte au dialogue avec la société civile alors même que de nombreux membres de cette société civile ont été arrêtés, que certains se cachent, que d’autres ont été blessés, souligne-t-il. La répression se concentre maintenant sur les leaders politiques de l’opposition traditionnelle, comme le Mouvement pour le changement démocratique, mais également sur des membres dissidents du parti au pouvoir, des membres du G40 ou du NPF [Front patriotique national, ndlr]. Alors même que je conduisais tout à l’heure, on m’a appris que Matthew Dickson du NPF avait été arrêté et accusé d’incitation à la violence. La répression est généralisée et continue, alors même que Mnangagwa parle de dialogue. Cela remet vraiment en question la sincérité du chef de l’Etat et son engagement envers un dialogue national. Le principal problème aujourd’hui c’est la militarisation de ce gouvernement. L’éléphant dans la pièce, c’est l’armée. Elle est l’instigatrice de cette violence et agit en toute impunité. Tant que nous n’aurons pas réglé ce problème, nous ne pourrons pas résoudre la crise du Zimbabwe. »

L’opposition politique a elle aussi rejeté la main tendue du gouvernement, estimant que le chef de l’Etat n’était pas sincère.

avec RFI