Le groupe armé antigouvernemental a repris du terrain ces dernières semaines et les combats contre l’armée congolaise se sont intensifiés autour de la capitale régionale du Nord-Kivu, faisant craindre un embrasement régional.
Plus tôt dans la soirée, le président kényan, William Ruto, qui assure actuellement la présidence de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC), avait annoncé la tenue d’un sommet extraordinaire de l’organisation régionale « dans les prochaines quarante-huit heures » en présence des présidents congolais, Félix Tshisekedi, et rwandais, Paul Kagame.
Selon une source consulaire européenne à l’Agence France-Presse (AFP), la frontière avec le Rwanda est fermée lundi matin à Goma. « Personne n’entre, personne ne sort, à part quelques personnels de l’ONU et leur famille évacués ce matin », a ajouté un travailleur humanitaire présent au principal point de passage entre la RDC et le Rwanda. Des bus ont été organisés lundi à la frontière rwandaise avec l’est de la RDC, prêts à évacuer des personnels de l’ONU et leurs familles venant de Goma.
« Goma s’apprête à tomber », s’alarme Paris
« Goma s’apprête à tomber », s’est alarmé lundi le ministre des affaires étrangères français Jean-Noël Barrot, ajoutant que Paris « condamne fermement l’offensive menée par le M23, soutenu par les Forces armées rwandaises » dans l’est de la République démocratique du Congo. « Les combats doivent cesser et le dialogue doit reprendre », a exhorté M. Barrot à Bruxelles, avant un conseil des ministres des affaires étrangères de l’Union européenne.
Par ailleurs, une « évasion massive » était en cours lundi au matin à la prison à Goma, grande ville de l’est de la RDC, selon une source sécuritaire à l’AFP. La prison, qui compte environ 3 000 détenus, a été « totalement incendiée » à la suite de cette évasion qui a causé des « morts », a précisé cette source sans donner de bilan à ce stade. Des prisonniers en fuite ont été aperçus dans les rues alentours, a constaté une journaliste de l’AFP.
Après l’échec d’une médiation entre la RDC et le Rwanda placée sous l’égide de l’Angola, le groupe armé du M23 et 3 000 à 4 000 soldats rwandais, selon les Nations unies (ONU), ont rapidement gagné du terrain ces dernières semaines.
Condamnation du Conseil de sécurité de l’ONU
Après une réunion d’urgence, le Conseil de sécurité de l’ONU a condamné le « mépris éhonté » de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC, réclamant le retrait « des forces extérieures » sans les nommer explicitement, selon une déclaration publiée dimanche soir.
Lors de cette réunion à New York, Kinshasa a accusé le Rwanda de lui avoir « déclaré la guerre » en envoyant de nouvelles troupes pour soutenir le M23. Quelques heures plus tôt, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui n’avait pas aussi clairement mis en cause Kigali jusque-là, a appelé « les forces rwandaises de défense à cesser de soutenir le M23 et à se retirer du territoire de la RDC ».
Jusqu’à présent, M. Guterres avait fait référence aux conclusions d’un rapport d’experts de l’ONU mettant en lumière le rôle de Kigali aux côtés du M23, mais sans explicitement appeler les forces rwandaises à cesser leur soutien et à se retirer. Alors que trois casques bleus ont été tués ces derniers jours, le secrétaire général de l’ONU a aussi rappelé que les attaques contre le personnel des Nations unies « pouvaient constituer un crime de guerre ».
Dimanche soir, Kigali a annoncé se placer dans une « posture défensive durable » au vu de l’évolution des combats de l’autre côté de la frontière. « Les processus de Luanda et de Nairobi nécessitent tous deux urgemment une nouvelle impulsion, afin de parvenir à une paix pérenne et à la stabilité pour tous les pays de notre région », ont également déclaré les autorités rwandaises.
Appels à la désescalade
Pendant ce temps, les appels internationaux à un cessez-le-feu se multiplient. Lors de la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU, plusieurs pays ont aussi montré du doigt le Rwanda, notamment la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
Le chef de la diplomatie britannique, David Lammy, s’est dit, dimanche, « profondément préoccupé par les attaques sur Goma », et a déploré sur X « des déplacements massifs de civils, des pertes humaines ainsi que la mort de casques bleus de l’ONU ». « J’ai parlé [au président du Rwanda] Paul Kagame et j’ai appelé à la désescalade, soulignant la nécessité pour le Rwanda et la RDC de retourner d’urgence à la table des négociations », a-t-il ajouté.
Dans une déclaration signée par ses vingt-sept pays membres, l’Union européenne a appelé le M23 à « arrêter son avancée » et le Rwanda à « se retirer immédiatement ». L’Union africaine a pour sa part réclamé « la stricte observation du cessez-le-feu convenu entre les parties ».
Une demi-douzaine de cessez-le-feu et trêves ont déjà été décrétés puis violés dans l’est de la RDC. Le dernier cessez-le-feu avait été signé à la fin de juillet 2024. En décembre, une rencontre entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame, dans le cadre du processus de paix chapeauté par l’Angola, désigné médiateur par l’Union africaine, avait été annulée faute d’entente sur les conditions d’un accord.
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