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AFRIQUE

L'actualité de la semaine en Afrique

Au Burkina Faso, 35 ans après les faits, le verdict du procès de l’assassinat de Thomas Sankara a été rendu, hier mercredi 6 avril, par le tribunal militaire de Ouagadougou. Le 15 octobre 1987, le père de la révolution burkinabè était assassiné, avec 12 de ses collaborateurs, au Conseil de l’entente, siège du pouvoir révolutionnaire. Son meilleur ami, Blaise Compaoré, qui lui succédera à la présidence, Hyacinthe Kafando -chef de la sécurité de Blaise Compaoré- et le général Gilbert Diendéré alors responsable de la sécurité du Conseil de l’entente, ont été condamnés à la prison à perpétuité. Il aura fallu 25 ans de bataille judiciaire, six mois de procès et plus de 110 témoignages pour obtenir ce verdict. Un moment historique pour Mariam Sankara, la veuve de l’ancien président.

RFI : Le verdict du procès de l’assassinat de votre mari vient enfin de tomber 35 ans après les faits, quelle est votre première réaction ?

Mariam Sankara : Je me dis qu'enfin ce procès a eu lieu, enfin le verdict est tombé… On a pensé par moments que ce procès ne commencerait pas, même quand il a commencé il y avait des doutes, il y a eu des suspensions, mais enfin le verdict a été rendu. Moi je salue l’insurrection de mes compatriotes qui ont fait partir Blaise Compaoré, et le gouvernement qui a été mis en place après cette insurrection à autoriser l’instruction du dossier et grâce à tout ça on est là aujourd’hui.

Blaise Compaoré, Hyacinthe Kafando, également le général Gilbert Diendéré sont condamnés à une peine de prison à vie, c’est plus que ce qu’avait requis le parquet militaire, comment appréciez-vous cette décision de justice ?

C’est vrai qu’on ne s’attendait pas à ce verdict, mais c’est quand même un acte grave qui a été commis, un assassinat, donc pour ça on ne peut pas dire que ces sanctions ne sont pas à la hauteur et aussi cela permettra de dissuader des personnes à commettre ces violences, parce qu’il faut que ces violences s’arrêtent en Afrique et au Burkina Faso.

 

Est-ce que l’absence de Blaise Compaoré, de Hyacinthe Kafando est pour vous une ombre qui continue de peser sur ce procès ?

Moi je me dis que s'ils avaient été là, peut-être que cela aurait donné le courage aux autres accusés de s’exprimer, de dire la vérité, parce que tous les accusés étaient dans la négation totale, ils ont tous nié, mais étant donné que les principaux acteurs Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando étaient en fuite, donc les autres aussi ont fait la même chose. Ils ne se sont pas repentis du tout, je les laisse avec la sanction de leur conscience.

Dès le début de ce procès on a aussi beaucoup entendu les mots de pardon, de réconciliation, le Burkina doit avancer… On évoque aussi la vieillesse de Blaise Compaoré, son état de santé, le fait qu’il devrait rentrer au pays, est-ce que pour vous c’est un scénario envisageable ?

On ne peut pas faire la réconciliation sans la justice. Il y a le dossier Thomas Sankara, mais il y a d’autres dossiers aussi, il faut absolument aussi que ces dossiers passent, mais bon, je pense que c’est aux Burkinabè de voir, il y a beaucoup de problèmes à résoudre quand même avant d’arriver à la réconciliation.

Justement on a vu des partisans dans la salle d’audience du général Gilbert Diendéré, le soutenir, et dire qu'il était sans doute l’homme providentiel qui pourrait sortir le Burkina de l’impasse sécuritaire où il se trouve, qu’en pensez-vous ?

Ça a été dit aussi pour Compaoré, je pense que si Diendéré ou Compaoré aimaient vraiment leur peuple, qu’ils soient en prison, qu’ils soient dehors, s’ils sont en mesure d’apporter leur aide ils devraient le faire parce que dans l’état physique dans lequel est Diendéré, je ne le vois pas au front, il est burkinabè, s’il aime ce peuple il peut apporter son aide tout en étant en prison.

Est-ce que ce verdict va enfin vous permettre ainsi qu’à votre famille de faire le deuil et peut-être d’ouvrir un nouveau chapitre dans votre histoire ?

Ce procès pour nous, ce qu’on attendait c’était la vérité. Pour moi ce qui est important, c’est que ce procès a permis aux Burkinabè de savoir qui était Thomas Sankara, l’individu, l’homme politique, qu’est-ce qu’il voulait de ce pays, et aussi de comprendre ceux qui l’ont assassiné, qu’est-ce qu’ils voulaient, c’était pour des intérêts égoïstes… L’affront lancé au président Sankara a été lavé parce qu’on le traitait d’aventurier, d’usurpateur, de renégat, de tout, personnellement je suis soulagé de ce côté parce que je peux dire qu’il est réhabilité, cela me soulage beaucoup. C’était dur d’entendre dire certaines choses, en tout cas ça nous apaise un peu quand même.

RFI

 

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