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AFRIQUE

L'actualité de la semaine en Afrique

Kigali a bien posé quelques conditions à cet accord (déjà controversé), conclu avec Londres pour « éloigner » les candidats à l'installation dans le royaume. Mais il en faudra davantage pour réparer ce qui aura été abîmé, surtout à l'image d'un dirigeant qui était en passe de devenir l'idole d'une certaine jeunesse africaine.

 

Le Royaume-Uni va « relocaliser » au Rwanda les migrants et les demandeurs d’asile entrés irrégulièrement sur son territoire, en attendant de statuer sur leur sort. Ils pourront, ensuite, soit s’établir dans le pays, soit rentrer chez eux ou, qui sait, être admis en Grande-Bretagne. Comment expliquer la vivacité des réactions que suscite cet accord, qui n’est pourtant pas le premier ?

Ce n’est, certes, pas la première fois que des États africains se voient proposer une telle offre, que la plupart finissent par décliner, en raison du coût politique dans l’opinion. Mais la manière totalement décomplexée avec laquelle Paul Kagame assume une transaction aussi préoccupante interpelle les consciences, d'autant plus que l’Afrique semblait le créditer d'un leadership visionnaire, en décalage avec l'acte que pose son pays.

C'est donc à dessein que, dans leurs réactions, les ONG ont autant insisté sur le fait qu’en dépit des prouesses économiques du Rwanda, Paul Kagame est loin d'être un démocrate. Ce qui renforce les inquiétudes quant à ce qu’il pourrait advenir de ces personnes qui plaçaient leurs espérances dans le Royaume Uni, et vont peut-être devoir s'inquiéter pour leurs libertés, au Rwanda. D'aucuns ont même rappelé que ce régime était soupçonné d'enlever (ou de liquider) ses opposants à l’étranger.

 

Kigali et Londres promettent pourtant d’aider ces personnes à reconstruire leur vie au Rwanda, pays dont les performances économiques, sous le leadership de Paul Kagame, sont admirées de tous…

Il faut davantage qu’une multitude d’intentions généreuses pour rassurer les ONG et les Nations unies, dans cette drôle de « relocalisation ». Si le rêve de ces personnes avait été de « reconstruire leur vie » au Rwanda, elles ne l'auraient pas risquée dans le désert, la Méditerranée, puis la Manche. Chaque fois qu'il nous est arrivé d'encenser le développement du Rwanda, les réactions pleuvent, qui rappellent quel dirigeant impitoyable peut être Paul Kagame. Tout aussi vaines sont les comparaisons bienveillantes avec Jerry J. Rawlings, qui, une fois son pays sur la rampe de lancement, démocratisa, puis passa le témoin. Sauf que l'on vous rétorquera que Paul Kagame a déjà passé au pouvoir deux fois plus de temps qu’il n’en a fallu à Rawlings pour faire du Ghana la brillante démocratie à l’économie prospère que l'Afrique admire.

Ceux qui pardonnent tout, ou presque, à Paul Kagame, partent du postulat que les Africains seraient prêts à tout subir, dès lors qu’ils peuvent manger à leur faim. Mais, c’est tout le contraire de ce que montrent ces peuples, dignes et debout, même dans la misère, qui sont d'abord épris de justice et de liberté, pour pouvoir s’épanouir, travailler au bien-être de leur communauté, sans envier personne. Les seuls freins au développement de ce continent sont les entraves aux libertés fondamentales, la perfidie de dirigeants politiques qui modulent les lois et les règles au gré de leurs intérêts, manipulent la justice, faussent l’équité, vicient les critères d’impartialité.

Pour réaliser à quel point ces valeurs sont intrinsèques à la vie en société en Afrique, il suffit de se remémorer cette injonction de ses sujets à l’Almamy Samory Touré, leur souverain: « Si tu ne peux être impartial, cède le trône aux hommes justes ! ». C'est dans l’hymne de l’Empire du Wassoulou. Rien de tel, en effet, que des dirigeants justes et impartiaux, pour stimuler et magnifier le génie d’un peuple.

Mais le président Kagame rappelait encore, il y a peu, la crédibilité de la justice de son pays, la fiabilité de son régime…

Difficile d'accepter la sincérité des compliments, pour les prouesses économiques, et de contester les imperfections relevées, sur le plan des libertés individuelles. Le Botswana, le Cap-Vert, la Namibie, Maurice, sont aussi des réussites économiques, en Afrique, et n’éprouvent aucun besoin de défendre l’honorabilité de leur démocratie. Car, cela saute aux yeux.

 

RFI

 

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