Devant les étudiants de l’ISP, le célèbre gynécologue congolais a égrainé les différents massacres des Congolais perpétrés, selon lui, par « nos envahisseurs ». Des massacres dont il appelle les étudiants à ne pas oublier pour éviter leur répétition.
« Depuis la guerre de l’AFDL en 1996 jusqu’aujourd’hui, des centaines des villages et des villes de notre pays ont été marqués au fer rouge de sang par la folie meurtrière de nos envahisseurs. Les massacres de Kishishe et Bambo marquent certes le paroxysme de l’actuelle guerre imposée à notre population, mais en rappelle d’autres et si nous ne faisons rien en annonce d’autres. », a alerté Mukwege dans son discours.
Cette conférence dont le thème était : « le viol utilisé comme arme de guerre et le rôle des établissements d’enseignement supérieur et universitaire dans la construction de la paix en RDC » a eu lieu au moment où « les plaies béantes » de la RDC saignent à nouveau dans le Nord-Kivu, souligne ce gynécologue congolais, avant de rappeler que le 29 et 30 novembre derniers à Kishishe et Bambo, « un énième massacre des civils innocents a été commis par le Groupe terroriste du M23, supplétif de l’armée rwandaise. »
Le prix Nobel de la paix 2018 estime que rester silencieux face aux massacres à répétition des Congolais c’est trahir leur honneur. « A l’heure où notre pays semble à nouveau rouler vers l’abime, en refusant l’oubli de nos morts, en refusant de nous resigner au silence au risque de trahir leur honneur et les rêves qu’ils caressaient, nous accomplissons un travail de vérité et de mémoire. », a-t-il fait savoir.
Sans langue de bois, Mukwege accuse le Rwanda d’être responsable de ces atrocités en RDC dans plusieurs ville et villages, notamment à Makobola, Lemera et Kisangani. « Nous rappelons à nos compatriotes et au monde qu’en maints endroits, l’armée rwandaise, ses supplétifs de l’AFDL, du CNDP, du RCD, du M23 ainsi que d’autres occupants, ont commis des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, voire des crimes de génocide à l’encontre de notre population. Des milliers de nos frères et sœurs ont été sauvagement exécutés à Lemera, Kasika, Makobola, Kisangani, Kaziba, Kaniola, Beni, Butembo, etc. A ce jour, plusieurs d’entre eux n’ont pour sépulture que le Rapport Mapping des Nations Unies dont les recommandations sont malheureusement restées lettre morte depuis 11 ans. », a-t-il regretté.
Comme dans ses traditions, celui qui écume les capitales occidentales pour faire entendre sa voix a invité la jeunesse à être la « sentinelle de la mémoire » face aux crimes dont sont victimes les Congolais depuis trois décennies à cause de la richesse de ce pays. Le cas des derniers massacres commis à Kishishe et Bambo par le M23 soutenu par le Rwanda.
« C’est autant des raisons de nous lever tous ensemble, comme un seul homme, de nous lever contre le broyage de notre humanité et contre la manipulation des faits qui falsifie l’histoire en tentant de faire passer des pyromanes pour des sauveurs », a-t-il motivé.
Des voix ne cessent de s’élever pour demander à Denis Mukwege d’être candidat à la présidentielle de 2023. Mais l’unique prix Sakharov congolais 2014 n’a pas encore donné suite à cet appel incessant de ses compatriotes. Le 18ème prix Nobel africain pense cependant que le pays a plus que jamais besoin d’une gouvernance responsable. « Tant que nous Congolais nous ne comprendrons pas que notre pays est trop riche pour être laissé en paix, tant que nous ne comprendrons pas que nous devons user de notre intelligence collective pour tirer aussi notre épingle du "grand jeu" qui se joue sous nos yeux, sans nous, nous resterons les dindons de la farce. Le temps est venu de nous organiser pour nous doter d’une gouvernance à la hauteur de ces enjeux mondiaux et prendre notre destin en mains », a-t-il fait remarquer.
Dido Nsapu / digital Congo
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