L'échange très tendu entre le capitaine des Léopards, Chancel Mbemba, et le sélectionneur des Lions de l’Atlas, Walid Regragui, à la fin du match RDC-Maroc, fait couler beaucoup d’encre. A l’origine, des propos tenus par le coach marocain à l’endroit du capitaine congolais, qui n’a pas du tout apprécié.
Au coup de sifflet final d’une affiche déjà mouvementée entre le Maroc et la RDC, dimanche 21 janvier, à San Pedro, une scène d’environ une dizaine de minutes a retenu l’attention de tout le monde autant que l’ensemble de cette rencontre d’un peu plus de 100 minutes - avec les temps additionnels disputés lors de chacune de deux mi-temps -. Sur la pelouse du stade Laurent Pokou, Léopards et Lions de l’Atlas se sont neutralisés (1-1) à l’occasion de la 2e journée de la phase des groupes de la CAN 2023.
Peter Waweru Kamaku, l’arbitre kényan, siffle la fin de cette opposition. C’est le moment choisi par Chancel Mbemba - déclencheur de l’action qui amène l’égalisation des siens - pour faire sa courte prière. Deux genoux sur l’aire de jeu et mains levées, le capitaine des Léopards, affectueusement appelé au pays “demi-dieu”, “rend grâce”, avoue-t-il, “à son Dieu”, lorsque Walid Regragui s’approche de lui. Ce dernier, visage à peine fermé, prononce quelques mots avant de serrer la main à Mbemba, qui répond en rajoutant une petite accolade. Mais le sélectionneur marocain n’a pas l’air satisfait. On le voit, visiblement demander au capitaine des Léopards de le regarder dans les yeux. La suite ? Des échauffourées sur le terrain. Une scène semblable à une bagarre généralisée mais qui, en réalité, n’en est pas une.
Des protagonistes réservés devant les caméras
Que s’est-il réellement passé au coup de sifflet final ? Certes difficile de le savoir et de le décrire exactement. En conférence de presse d’après match voire lors d’une interview en zone mixte, les différents protagonistes se sont livrés à la presse en étant beaucoup plus apaisés et détendus qu’ils ne l’ont été sur la pelouse à la fin de cette rencontre. Ils ont certainement pu digérer et n’ont visiblement pas voulu attisser le feu. Mais ce qui est sûr, Chancel Mbemba a indiqué avoir reçu, de la part de Walid Regragui, des propos discourtois. “ Je ne suis pas parfait mais quand je suis sur le terrain, je respecte tout le monde et cela doit être réciproque. C’est mieux pour moi de garder mon silence. Je n’imaginais pas que ce mot pouvait sortir de la bouche du coach [Walid Regragui, ndlr] ”, a-t-il déclaré en zone mixte.
A en croire certaines sources à San Pedro, le sélectionneur marocain aurait balancé un propos raciste. Mais Chancel, quant à lui, n’a pas voulu dévoiler à la presse ce qui lui aurait exactement été dit par Walid Regragui. Et ce, en dépit de l'insistance des journalistes. “ A lui-même de vous le dire’, a-t-il conclu, quittant précipitamment les micros lui tendus.
“ Il n’y a pas de souci entre Mbemba et moi ou l’équipe ”
Les deux sélectionneurs ont aussi été interrogés sur la question. Si Walid Regragui est directement impliqué, Sébastien Desabre, quant à lui, est un témoin privilégié. Le sélectionneur des Léopards est, sur les images, le premier à tenter de maîtriser son homologue marocain sur la pelouse du stade Laurent Pokou. Mais devant la presse, ils ont sans doute aussi calmé le jeu.
“ Ça arrive dans le football. J’ai beaucoup de respect pour Mbemba. C’est peut-être l’adrénaline qui l’a fait répondre comme ça. Mais il n’y a pas de souci. Ce qui est un peu dommage, je l’ai dit à mes joueurs, il fallait rester beaucoup plus calme. On n’a pas donné une belle image ni de nous ni du Congo. Peut-être avec la chaleur, la tension a été un peu élevée chez tout le monde. Mais ce n’est pas un exemple. Il n’y a pas de souci entre Mbemba et moi ou l’équipe. On avance, c’est passé maintenant ”, a réagi Walid Regragui en conférence de presse d’après match.
La chaleur, un aspect important ? cela corrobore avec l'avis de Sébastien Desabre. Le match entre la RDC et le Maroc s’est joué à 14 heures GMT, même heure à San Pedro. Dans l’après-midi de ce dimanche, la température moyenne était de 32° de chaleur dans cette ville ivoirienne. “ Ce n’est même pas une altercation au final mais des mots forts. Il fait très chaud, les joueurs et même nous, sur le côté, le ressentons. Que ce soit le Maroc ou la RDC, nous faisons beaucoup d’efforts ”, a fait remarquer Sébastien Desabre chez nos confrères de Canal+, avant de noter que “c’est un grand match de CAN, ça peut chauffer gentiment et se calmer après. ça s’est calmé dans les vestiaires (...). Chancel, on le connait, on connait également son professionnalisme et son respect pour tout le monde et l’amour qu’il a pour sa nation ”.
La confession et le démenti de Walid Regragui
Le sélectionneur marocain a visiblement donné une autre interview après sa réaction en conférence de presse devant des journalistes accrédités pour la compétition. Déjà dans la salle, il s’est exprimé volontiers en détail sur cette scène alors que le modérateur demandait déjà de passer à la question suivante. “ Non mais laisse moi finir. Il n’y a pas de souci, on va expliquer ”, a lancé Walid Regragui avant de donner son point de vue. Mais auprès de nos confrères de l’Equipe, dans un article diffusé peu avant minuit, le coach marocain livre un discours quasiment opposé à celui de la conférence de presse. Le souci est bien réel. Regragui reproche à Chancel Mbemba de les avoir “pris à partie” avec son adjoint “sur le bord de touche avant la fin du match”.
“ Et à la fin, malgré ça, je vais lui serrer la main pour lui dire aussi : mais pourquoi tu me parles comme ça ? Et là, il regarde ailleurs, genre je ne te serre pas la main ”, raconte Walid, qui poursuit : “ je lui ai retenu la main, ça se voit sur les images, et il a commencé à crier dans tous les sens. je lui ai dit : tu te la racontes ! et il me dit : tu m'as traité de con ! ”.
Le sélectionneur nie n’avoir jamais tenu une telle parole. “ Il n’y a pas de souci qu’il ait entendu ça, même si je ne l’ai jamais dit ”, s’explique-t-il à la même source. Mais qu'a-t-il dit à la place ? A son tour, Regragui appelle le capitaine des fauves congolais d'être " un peu honnête avec lui-même".
La Confédération africaine de football (CAF) n’a pas communiqué, du moins jusqu’ici, sur cet incident de fin de match. Néanmoins, on voit, sur les images, les arbitres suivre tous les mouvements et même quand l’attaquant marocain, Youssef En-Nesyri, poursuit Chancel Mbemba dans les vestiaires en courant et que son coéquipier, le gardien Yassine Bounou, tente de l'empêcher.
Japhet Toko / actualite.cd
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