Général Adolphe Nshimirimana
Burundi
Présenté comme le numéro deux du régime burundais de Pierre Nkurunziza, le général Adolphe Nshimirimana a été tué lors d'une attaque contre sa voiture. Un assassinat qui laisse craindre un durcissement de la répression au Burundi.
Le général Adolphe Nshimirimana, bras droit du président du Burundi, Pierre Nkurunziza, et chef de la sécurité intérieure, a été tué, dimanche 2 août, à Bujumbura, la capitale, dans une attaque à la roquette, relançant les craintes d'une escalade des violences qui frappent le Burundi depuis trois mois.
Ancien chef d'état-major de l'armée et souvent présenté comme le numéro deux du régime, le général Nshimirimana a été victime, d’après des témoins, d'une attaque contre sa voiture. Le véhicule a été touché par deux roquettes, puis arrosé à l'arme automatique. Trois de ses gardes du corps ont trouvé la mort. La police a fait état de sept arrestations, sans aucune autre précision.
"On est face à un crime clairement politique, commis par des gens très bien organisés, rapporte un habitant de la capitale burundaise interrogé par France 24. La situation est confuse à Bujumbura puisque c’est l’un des hommes-clés du pouvoir qui est mort et tout le monde ici à peur d’une répression."
Un incontournable du pouvoir
"Maillon fort de la galaxie Nkurunziza", comme le décrit l’hebdomadaire "Jeune Afrique", Adolphe Nshimirimana est considéré comme l’artisan de la mobilisation des partisans du président, dont la candidature à un troisième mandat a provoqué une grave crise politique dans le pays.
À la tête durant dix ans du redouté Service national de renseignement (SNR), communément appelé la "Documentation", celui que ses partisans appelait simplement "Adolphe" était issu des rangs de la rébellion hutue qui affronta les Tutsi durant la guerre civile (1993-2005). "Ses faits d’armes au ‘maquis’ lui ont valu de grimper les échelons jusqu’au sommet de l’état-major de la branche armée du mouvement rebelle hutu CNDD-FDD , transformé en parti politique en 2003, avant de prendre le pouvoir", écrivait en juin dernier le quotidien "Libération" dans un portrait consacré au général.
Après avoir été chef d’État major de l’armée et patron de la SNR, Adolphe Nshimirimana avait été évincé de la tête du pouvoir dans le cadre d'un conflit au sein de la hiérarchie militaire, tout en restant incontournable. Il avait ainsi gardé en sous-main le contrôle de l'appareil sécuritaire du pouvoir et était régulièrement soupçonné d’être impliqué dans plusieurs affaires sensibles, dont le meurtre, le 7 septembre 2014, de trois religieuses italiennes dans leur couvent de Kamenge, le quartier de Bujumbura où le général avait établi ses bases et faisait régner la peur.
"Tout le monde a peur"
Le correspondant de RFI arrêté et tabasséPeu de temps après l'annonce de la mort du général Nshimirimana, le correspondant de Radio France internationale (RFI) au Burundi, Esdras Ndikumana, a été arrêté alors qu'il prenait des photos du lieu de l'attaque.
Le journaliste a été emmené au siège du Service national de renseignement (SNR), qu'a dirigé le général Nshimirimana, où il a été passé à tabac et traité de "journaliste ennemi".
Esdras Ndikumana a été relâché et est actuellement soigné à l'hôpital pour un doigt cassé.
Pour le camp présidentiel, la mort de l'officier supérieur a constitué un choc. "La situation est très grave. Le général Adolphe était quelqu'un d'indispensable dans le système. On est en train de tout mettre en œuvre pour gérer la situation, mais ce n'est pas facile. Nos garçons ont envie de se venger", a affirmé à l'AFP un haut cadre de la présidence.
"On peut craindre que dans la colère il y ait des massacres. Tout le monde à peur. Je pense que dans les quartiers où l’opposition à un troisième mandat de Pierre Nkurunziza était la plus forte, les gens doivent commencer à se barricader pour éviter de subir la colère des membres du parti au pouvoir", indique l'habitant de Bujumbura.
La mort d'Adolphe Nshimirimana intervient une semaine après l’annonce de la victoire du contesté Pierre Nkurunziza à la présidentielle burundaise (avec 69 % des suffrages). L'annonce au printemps de la candidature du chef de l'État sortant a déclenché des manifestations et des violences qui ont fait plusieurs dizaines de morts et provoqué, en mai, une tentative de coup d'État qui a été déjouée.
Plus de 175 000 habitants du Burundi ont fui ces derniers mois dans les pays voisins et les Nations unies ont averti qu'un demi-million d'habitants pourraient finir par quitter le pays si la crise devait persister.
Les dirigeants des États voisins et les ambassades occidentales redoutent que le Burundi replonge dans la guerre civile.
Avec Afrance24
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