Un nouveau rapport du Groupe d’experts mandaté par le Conseil de sécurité des Nations unies a une nouvelle fois mis en exergue l’appui et l’accompagnement que les Forces de défense du Rwanda (RDF) apportent à la rébellion de l’AFC/M23, rébellion qui contrôle une grande partie des zones et territoires des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, dans l'Est de la République Démocratique du Congo. 

Dans ce rapport consulté lundi 8 décembre 2025 par ACTUALITE.CD, le Groupe affirme avoir obtenu des preuves supplémentaires, notamment des témoignages provenant de sources internes à l’AFC/M23, d’un commandant de haut rang du mouvement, ainsi que des sources de renseignement, diplomatiques et sécuritaires. Ces éléments confirment la poursuite des déploiements transfrontaliers des RDF, leur présence renforcée au Nord et au Sud-Kivu, leur positionnement en première ligne, ainsi que leur engagement direct dans les combats  notamment en prenant la tête des opérations anti-FDLR dans les territoires de Nyiragongo et de Rutshuru.

"Au moment de la rédaction, on estimait prudemment qu'au moins 6 000 à 7 000 membres des Forces de défense du Rwanda (FDR)  constituant au minimum deux brigades et deux bataillons de forces spéciales restaient déployés au Nord et au Sud-Kivu. Il s'agissait de formations organisées par tâches et adaptées à la mission. Créée spécifiquement pour l’opération transfrontalière en RDC et comprenait des forces spéciales des éléments et un nombre important de réservistes", rapporte le rapport.

Selon le document toujours, une brigade des RDF opérait au sein de la « Première zone de défense » de l’AFC/M23, couvrant Goma, Nyiragongo, Binza, Bwito, Rutshuru, ainsi que Kanyabayonga, Kirumba, Kipese. Une autre brigade des RDF opérait dans la « deuxième zone de défense », couvrant Masisi, Walikale, Bibwe, Kalembe, le long de la ligne de front de Pinga, ainsi que des zones du Sud-Kivu, notamment Walungu, Mwenga et Minembwe.

"Tout au long de la période considérée, de fréquents renforts et redéploiements ont eu lieu vers et entre ces théâtres d'opérations. Les RDF avaient établi une base sur l'île d'Idjwi, souvent utilisée pour les déploiements et rotations de troupes via le lac Kivu. Le soutien des RDF a été crucial pour le succès des opérations, notamment pour la prise de nouvelles zones comme Bibwe. Des sources AFC/M23, dont un commandant supérieur participant actuellement à des opérations conjointes AFC/M23-RDF, ont confirmé que les éléments RDF –désignés comme « Force amie »  « gèrent les lignes de front » et « contrôlent les combattants M23 »", dit le rapport du groupe d'experts de l'ONU

Toujours selon le document, des sources y compris des témoins oculaires et des sources AFC/M23 ont systématiquement distingué les soldats RDF des combattants AFC/M23 en fonction de leur équipement, de leur discipline, de leur comportement opérationnel et de leurs structures de commandement. Les RDF, déployés avec du matériel plus avancé, opéraient en formations distinctes malgré des manœuvres conjointes avec l’AFC/M23, et présentaient des schémas de déplacement et des accents distincts, les rendant facilement identifiables sur le terrain. 

"Le Groupe a continué de documenter l’utilisation par les RDF de technologies et d’équipements militaires de pointe, notamment des systèmes de brouillage et d’usurpation d’identité. Le Groupe a également procédé à une évaluation technique d’une radio tactique saisie sur un soldat des RDF à Masisi, en mars 2025, portant l’inscription « RT-7106 TADIRAN »COMMUNICATIONS", ajoute le rapport

L’apparition de ce rapport intervient dans un contexte où les États-Unis poursuivent leurs efforts pour résoudre la crise entre Kinshasa et Kigali. Présidée par Donald J. Trump, la signature des Accords de Washington a été qualifiée d’« historique » par le Département d’État américain. Ce cadre réaffirme les engagements visant à mettre fin à des décennies de conflit, à renforcer la coopération économique et à jeter les bases d’une paix durable entre la République démocratique du Congo et le Rwanda.

La médiation qatarie constitue l’autre pilier diplomatique du moment. Un accord-cadre a été conclu entre Kinshasa et l’AFC/M23, mais son contenu reste encore à définir dans les négociations. Sur le terrain, la situation demeure inchangée : lignes de front actives, absence de mesures de confiance, positions figées. La coexistence des processus de Washington et de Doha illustre la complexité du dossier : d’un côté, une médiation interétatique centrée sur les relations entre la RDC et le Rwanda ; de l’autre, une négociation politico-militaire directe avec la rébellion.

Clément MUAMBA