Le secrétaire d’État Antony Blinken a exprimé jeudi les inquiétudes des États-Unis en matière de droits de l’homme au Rwanda, lors de discussions avec le président Paul Kagame à Kigali, dernière étape de sa tournée africaine visant à contrecarrer l’influence russe.
Il a en particulier abordé le sort du héros de « Hôtel Rwanda », Paul Rusesabagina, qui purge depuis l’an dernier une peine de 25 ans de prison pour « terrorisme » et dispose d’un statut de résident permanent aux États-Unis.
Antony Blinken s’exprimait lors d’une brève visite au Rwanda, troisième et dernière étape de sa tournée africaine après l’Afrique du Sud et la République démocratique du Congo (RDC).
Cette mini-tournée, sa seconde en Afrique subsaharienne depuis sa prise de fonctions, intervient peu après celle du ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov, qui s’est rendu en juillet au Congo-Brazzaville, en Égypte, en Éthiopie et en Ouganda.
Jeudi lors d’une conférence de presse à Kigali, M. Blinken a exprimé les « graves inquiétudes » de Washington en matière de droits de l’homme au Rwanda.
« Comme je l’ai dit au président Kagame, nous pensons que les gens dans tous les pays devraient pouvoir exprimer leurs opinions sans peur d’intimidation, d’emprisonnement, de violence ou de toute autre forme de répression », a déclaré M. Blinken.
Il a par ailleurs souligné « les préoccupations » américaines concernant « le manque de garanties de procès équitable » fournies à Paul Rusesabagina.
La famille de ce dernier avait justement indiqué dans un communiqué qu’elle espérait de M. Blinken que son « engagement direct » aide à mettre fin à leur « cauchemar » et celui de leur proche, dont la santé se détériore selon elle.
Paul Rusesabagina, 68 ans, a été rendu célèbre par le film « Hôtel Rwanda », sorti en 2004, qui raconte comment ce Hutu modéré qui dirigeait l’Hôtel des Mille Collines dans la capitale rwandaise a sauvé plus de 1000 personnes durant le génocide des Tutsi en 1994. En mai, Washington a estimé qu’il était « injustement détenu » par la justice rwandaise.
« Stabilité régionale »
En amont de l’arrivée du secrétaire d’État, la société civile et des ONG avaient demandé une prise de position américaine sur la question des droits de l’homme, Human Rights Watch appelant M. Blinken à « signifier d’urgence (à Kigali) qu’il y aurait des conséquences à la répression et aux abus exercés par le gouvernement au Rwanda et au-delà ».
En écho, la responsable de l’opposition rwandaise Victoire Ingabire a affirmé à l’AFP que M. Blinken devait « soulever la question des journalistes et des politiciens emprisonnés » pour s’être opposés au gouvernement de Paul Kagame.
Le secrétaire d’État américain a par ailleurs indiqué avoir discuté avec M. Kagame de la question d’allégation de soutien à un groupe rebelle en RDC, le M23, sujet qu’il avait évoqué la veille à Kinshasa.
« Tout soutien ou coopération avec quelconque groupe armé dans l’est de la RDC met en danger les communautés locales et la stabilité régionale, et chaque pays dans la région doit respecter l’intégrité territoriale des autres », a déclaré jeudi M. Blinken.
Selon un rapport d’experts missionnés par les Nations unies, et consulté début août par l’AFP, l’armée rwandaise a « lancé des interventions militaires contre des groupes armés congolais et des positions des Forces armées congolaises » depuis novembre 2021 et jusqu’en juin 2022. Kigali a démenti catégoriquement.
Le M23 est une ancienne rébellion à dominante tutsi vaincue en 2013, qui a repris les armes en fin d’année dernière en reprochant à Kinshasa de n’avoir pas respecté des accords sur la démobilisation et réinsertion de ses combattants.
Kinshasa accuse Kigali de soutenir cette rébellion, ce que le Rwanda dément.
Lundi, les États-Unis ont dévoilé une refonte tous azimuts de leur politique en Afrique subsaharienne où ils entendent contrer la présence russe et chinoise, et développer notamment des approches non militaires contre le terrorisme.
La Presse
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