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AFRIQUE

L'actualité de la semaine en Afrique

Abdallah Hamdok est de nouveau Premier ministre au Soudan. Il a retrouvé ses fonctions hier suite à un accord signé avec le général Burhan, auteur du putsch du 25 octobre. Mais le front anti-putsch rejette tout accord avec le général Burhan et n’entend pas baisser les bras.

 

Près d’un mois après le coup d’État, les deux hommes s’engagent à relancer la transition démocratique censée aboutir à un transfert de pouvoir aux civils et à des élections.

Réinstallation d’Abdallah Hamdok, libération des prisonniers politiques et retour à un partage de pouvoir entre militaires et civils : c’étaient les conditions posées par la communauté internationale pour continuer à soutenir le Soudan. De ce point vue, l’accord conclu hier permet donc au général Burhan de sortir de l’impasse dans laquelle l’avait plongé son coup d’État. Au passage, il obtient gain de cause sur la nature du futur gouvernement : il devra être composé technocrates, comme le réclamait le général avant de mener son putsch. 

Mais cet accord n’est pas sans zones d’ombres, analyse notre correspondante régionale, Florence Morice. Il prend certes pour cadre de référence la déclaration constitutionnelle signée au début de la transition mais prévoit que ce texte devra être amendé... sans plus de précisions. Un texte que le général Al-Burhan a par ailleurs violé et modifié récemment notamment pour en exclure les Forces pour la liberté et le changement.

Par ailleurs, l’accord ne précise pas la date des futures élections, et ne se prononce pas non plus sur la question - centrale - du transfert de la présidence du conseil de souveraineté aux civils. Sans oublier qu’entre-temps le général a remanié ce conseil à sa guise. 

 

« Trahison »

Cet accord affaiblit donc considérablement Abdallah Hamdok. Après avoir brandi pendant des semaines des photos de lui et réclamé sa remise en liberté, certains manifestaient déchiraient son portrait hier à Khartoum, l’accusant avec cet accord d’avoir « trahi le sang des Soudanais ». L’Association des professionnels soudanais, fer de lance de la contestation anti-Bachir, a dénoncé fermement « l'accord des traîtres qui n'engagent que ses signataires ». La signature d'Abdallah Hamdok ressemble pour eux à « un suicide politique ».

Trahison. Le mot est sur toutes les lèvres, rapporte notre correspondant à Khartoum, Eliott Brachet, alors que des milliers de Soudanais occupaient les rues du pays au moment de la signature de cet accord. « C’est le désespoir. On ne s’attendait pas ça de la part de Hamdok. Avant, il a toujours été de notre côté, il portait nos revendications. Mais aujourd’hui, c’est un retour en arrière. Il s’est aligné avec l’agenda d’Al-Burhan, il a laissé derrière lui les demandes de la rue. »

 

Aujourd’hui, la rue demande que justice soit rendue après la répression sanglante des dernières semaines. « Nous avons eu 40 martyrs. Si Burhane accepte demain d’être jugé pour ça, on n’a pas de problème à négocier avec l’armée. Mais aujourd’hui nous rejetons complètement cet accord car nous n’avons plus aucune confiance dans l’armée. Nous avons confiance dans la rue ici devant vous, qui souhaite un gouvernement 100% civil. Ce n’est pas Hamdok, Burhane ou Hemetti qui la feront changer d’avis. »

Perte de crédibilité

Un manifestant a encore été tué hier dans la banlieue de Khartoum hier, un adolescent 16 ans. Il a succombé à une blessure par balles selon une source médicale. Au total la répression a causé la mort de 41 Soudanais au moins depuis le coup d’État du 25 octobre. 

Pour l'analyste Kholood Khair, du think tank soudanais Strategie Partners, c'est justement cette violence qui a motivé la décision du Premier ministre.

« L’une des raisons pourrait être l’augmentation permanente du nombre de morts suite aux manifestations. C’est quelque chose qu’il a clairement exprimé durant son discours, il veut stopper le bain de sang. Mais dans la rue, les gens lui répondent : "dans ce cas, pourquoi passer un accord avec les responsables de ce bain de sang ?" Temps qu’il n’aura pas répondu a cette question, on ne peut faire que des suppositions… »

« C’est bien Abdallah Hamdok qui semble être le grand perdant de cet accord, poursuit le spécialiste. Il a perdu beaucoup de crédibilité et la confiance de la rue. Il est maintenant vu comme un homme de compromis, alors qu’il était respecté et loué par les manifestants justement pour sa capacité à dire non aux militaires. Cet accord est donc vécu comme une trahison par les pro-civils. Même si le calcul d'Hamdok est sûrement d’éviter toute prolongation des violences, que ce soit vis-à-vis des manifestants ou entre le régime et les groupes armés. »

 

RFI

 

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