L'ambassade de France ferme ses portes jusqu'à nouvel ordre à Port-au-Prince, en réaction à la détérioration de la situation dans la capitale haïtienne. L'annonce par le gouvernement d'une hausse des prix du carburant – ils devraient doubler, selon le ministre du Travail – a ravivé la colère des Haïtiens. Ils manifestent depuis plusieurs semaines déjà contre l'insécurité, la vie chère et les pénuries récurrentes de carburant dans les stations de service. La crainte d'un blocage total pousse aussi des compagnies aériennes à suspendre leurs vols.
À Port-au-Prince, la situation est très tendue. Les banques et les commerces restent fermés. Pas non plus de transport en commun. Les rues de la capitale haïtienne sont jonchées de véhicules, de débris, parfois de pneus enflammés.
Plusieurs villes paralysées
Même si certaines barricades ont été levées par la police la nuit dernière, la circulation reste très difficile, entre autres dans le quartier du Champs-de-Mars, où se situe l'ambassade de France. Cette dernière a fermé ses portes jusqu'à nouvel ordre, comme l'ambassade d'Espagne, et avec elles la possibilité d'obtention de visas Schengen pour l'Europe. Paris conseille à ses ressortissants de limiter leurs déplacements au strict nécessaire et de prévoir un stock de biens de première nécessité.
La situation, également préoccupante dans plusieurs villes de province, a poussé American Airlines à suspendre ses vols mardi.
La crainte d'un nouveau blocage total plane sur le pays. Comme en 2018 et 2019, suite – déjà – à l'annonce d'une hausse des prix des carburants. La colère des Haïtiens se cristallise aussi autour de l'inflation, de l'insécurité... L'emprise des gangs s'étend sur le territoire. Une colère, instrumentalisée par certains hommes politiques, qui souhaitent évincer le Premier ministre Ariel Henry.
La décision de trop
Dans la commune des Gonaïves, par exemple, des milliers de manifestants ont gagné les rues, comme l'explique le correspondant de RFI, Paul Ronel. Ils dénoncent le gouvernement d’Ariel Henry d’avoir revu à la hausse le prix du carburant sur le marché local. Désormais, le gallon de la gazoline passe de 250 à 570 gourdes, celui du diesel ( gasoil ) passe de 353 à 670 gourdes et le kérosène de 352 à 665 gourdes.
Dans les rues où règne le chaos, un chauffeur de taxi moto s'emporte contre le Premier ministre : « Au moment où le pays est en crise et que disons que nous en avons assez de la cherté de la vie et de la pénurie de carburant, Ariel Henry annonce qu’il va augmenter le prix du carburant dans les stations service à plus de 500 gourde le galon . Que Dieu m’entende, ça ne passera pas ».
« Du feu partout, pillages des magasins », c’est en tout cas ce que scandent ces manifestants. Pour eux, la décision du Premier ministre haïtien, à moins de deux semaines de la réouverture des classes, est irresponsable. Habillé en tenue militaire, un homme, à la tête d’une foule de manifestants qui brandissent leurs branches d’arbres vers le ciel, dénonce le caractère irréaliste de cette mesure. « Nous n’acceptons pas la conjoncture actuelle du pays. Ariel ne peut annoncer qu’il va revoir à la hausse le prix du carburant. Les raisonnements d’Ariel Henry ne sont pas adaptés à la réalité. Moi, j’ai quatre enfants à envoyer à l’école cette année. Je n'ai même pas encore les moyens de leur acheter un cartable ».
Arrivée devant l’École de Droit et Sciences économiques, des protestataires ont lancé des pierres dans l’enceinte de l’université. Les étudiants ont riposté. Des heurts ont éclaté, faisant plusieurs blessés.
Rfi
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